Les sulfites et les vins bio sans sulfite ajouté

Publié le par Didier Vandenberge

L’utilisation des sulfites dans le vin s’est développée à la fin du XVIIIième siècle pour faciliter la conservation des vins mis en bouteille. Le dioxyde de soufre, communément appelé sulfite, est un gaz de formule chimique SO2. C'est un additif alimentaire conservateur largement utilisé l’industrie agroalimentaire pour ses propriétés chimiques.

Il a une action antiseptique contre le développement des microorganismes et permet au vinificateur de maîtriser la flore microbienne du vin pendant la fermentation. Nous vous rappelons (voir article du 28 février 2014 sur le levurage) qu’une élimination ou une mise en sommeil de certaines levures produit par sélection du milieu fermentaire, d’excellents vins technologiques répondant qualitativement et gustativement aux exigences d’une clientèle bien formatée. Cette pratique limite les mauvaises surprises et uniformise le goût du vin. Pendant la phase de conservation du vin, les sulfites luttent efficacement contre le développement des bactéries lactiques, des bactéries acétiques, des levures (pouvant provoquer la refermentation des vins doux), des Brettanomyces (donnant des odeurs d’écurie) et des bactéries provoquant les maladies de la graisse, de la tourne ou de l'amer.

Son action est également anti-oxydante ce qui limite l’oxydation des composés phénoliques responsables de l’altération des qualités sensorielles du vin au cours de la conservation. A l’extrême, il va même jusqu’à limiter l’apparition de l’évent et donc la madérisation du vin. Par ailleurs, il possède une activité anti-oxydasique, ce qui diminue l'activité des enzymes naturelles du raisin responsables de défauts tels que la casse brune. Il influence dans une moindre mesure la dilution des anthocyanes, molécules responsables de la couleur des vins rouges.

En œnologie, les sulfites s’utilisent sous forme solide (granulés ou brûlage de mèches), liquide (par exemple une solution de bisulfite de potassium) ou gazeuse. Ils peuvent être appliqués lors des différentes phases de la vinification et de la conservation du vin telles que : la vendange, la réception de la vendange, le pressurage, l'encuvage, le mutage dans le cas des vins doux, la fermentation alcoolique, la fermentation malolactique, l'élevage, la conservation du vin et juste avant le conditionnement. Les quantités de SO2 ajoutées au raisin et au vin dépendent également des pratiques du producteur et des contraintes techniques liées aux produits élaborés. La concentration décroit d’un vin doux à un vin blanc sec, d’un vin effervescent jusqu’à un vin rouge.

Diverses techniques de sulfitageDiverses techniques de sulfitage

Diverses techniques de sulfitage

Pour les pays de l'Union Européenne, depuis 2005, au-delà d'une teneur en SO2 de 10 mg/L, l'étiquetage est obligatoire (dans la langue du pays de consommation), mais malheureusement sans indication de la quantité, pénalisant de la sorte les vins à faible teneur. La réglementation Européenne 606/2009[7] qui régit l'utilisation du dioxyde de soufre en œnologie préconise des teneurs maximales admissibles en "SO2 total" dans un vin comme synthétisées dans le tableau ci-dessous :

Les sulfites et les vins bio sans sulfite ajouté

Il est à noter que ces doses sont rarement atteintes dans les vins. En moyenne, les doses moyennes en France, sont de 75 mg/L pour les vins rouges et de 105 mg/L pour les vins blancs.

L’inconvénient majeur du SO2 se situe sur le plan sanitaire car il provoque des réactions d’intolérance, plus particulièrement chez certaines personnes asthmatiques. A l'état de gaz dissous, le SO2 est un corrosif sévère pour les muqueuses de tous les organes en contact. Les symptômes les plus fréquents sont les nausées et les maux de tête. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a fixé à 25 milligrammes la dose journalière admissible, sans préciser sous quel état. Une alimentation saine et équilibrée apportant en moyenne 15 milligrammes de SO2 par jour, il ne nous reste donc que 10 milligrammes pour nos boissons. Pour un vin classique, cela représente en moyenne un verre de vin rouge ou un demi-verre de vin blanc. Si l’on consomme un vin sans sulfite ajouté, cela revient à 2 verres et demi de rouge ou deux verres de blanc ce qui est plus conforme aux habitudes de consommation en France.

Les vins sans sulfites à proprement parler n’existent pas. Ils contiennent tout de même du SO2 provenant des levures de fermentation naturelles à raison de 5 à 30 mg/L. On parlera alors de vins « sans sulfite ajouté ». Ils sont fortement relayés médiatiquement du fait d'une prise de conscience des consommateurs dans le prolongement de la mouvance des vins biologiques et des vins biodynamiques. Mais ils ne sont pas faciles à produire. Les principales limites à l'élimination complète des sulfites dans l'élaboration du vin sont d’ordre technique : conditions de conservation, risques accrus de piqures acétiques, risques de refermentation ou d'altération, style aromatique moins flatteur, etc.

Ces vins sont en général plus fruités, vivants et libres dans leur évolution. Ils sont également plus digestes. Ils se consommeront ordinairement plus jeunes que les vins ordinaires (certains ont même une date de péremption), mais il n’y a pas de généralité : en fonction du producteur et de la vinification, certains peuvent même vieillir davantage que des vins ordinaires. En définitive, ils ne laisseront pas indifférents les amateurs de vins authentiques.

Nectar dit vin vous présentera prochainement 7 vins sans sulfite ajouté dégustés et commentés lors d’un team event d’une grande entreprise bruxelloise (cf. article sur les blancs, les rosés et les rouges).

Publié dans Oenologie

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